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Monsieur Roman
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29 mars 2012

Portrait du père de Maurice Roman

Maurice Roman semble hanté par l’accumulation des morts: il est âgé, se dit qu’il ne va pas tarder à les rejoindre, que sa vie a poussé sur les multiples couches de leur humus. Peut-être est-ce pour cela qu’il juge utile de recenser mémoires et souvenirs pour, se refusant à n’être que le gardien de ses cimetières, se situer à côté d’eux. L’écriture l’amène à revisiter sa mémoire. Il dit passer désormais une grande part de ses jours à tenter de se rappeler des événements passés, à remuer les vieux papiers et les photos que sa famille a conservé dans ses successifs greniers et que, pour sa part, il s’est toujours refusé à jeter. Cet univers occulté, oublié, dans sa revenue au jour le force ainsi à se rappeler, peut-être à croire se rappeler, à construire des souvenirs qui ne sont peut-être pas si authentiques que cela mais qui, pourtant, lui imposent leur évidence, forcent, avec la solidité du réel sa conscience à les prendre en charge. C’est ainsi qu’avant de poursuivre l’histoire de sa vie, il dit: «J’avance dans un taillis d’images, de mots, de conversations qui refusent de me laisser en paix». Voici la suite de son récit:

«Revenu de la guerre, son père devait avoir perdu toutes illusions et cette innocence qui l’avaient poussé à s’engager dans la carrière de «hussard de la République». Enfant unique d’une famille très modeste de Carnaux (son père, m’a-t-il dit, était vendeur dans une petite quincaillerie; sa mère faisait à l’occasion quelques ménages et repassages), il avait eu la chance d’être pris en main par un de ses instituteurs qui avait décelé en lui des capacités intellectuelles, l’avait soutenu dans ses études convainquant ses parents qu’il pouvait, en l’aidant à préparer le concours d’entrée en sixième et lui faisant obtenir une bourse, aller au lycée préparer le concours d’entrée à l’école normale. Davantage, il ne fallait pas trop rêver… En 1911, il avait été reçu à l’école normale de Mende, préfecture du département de la Lozère.

D’après ses photos, son père, dans sa jeunesse, était très beau. Grand, élancé, bien proportionné, il avait des traits réguliers, bien dessinés avec une certaine fermeté dans le visage ; de grands yeux noirs intelligents, limpides, vifs, lumineux. A cela s’ajoutait une gentillesse incontestée et une ouverture d’esprit qui faisait sentir à tous ses interlocuteurs qu’ils pouvaient, sans nulle gêne se confier à lui : il savait écouter et ne rien répéter de ce qui lui avait été dit. Manifestant une grande empathie, il considérait tout homme ou femme comme dignes de son intérêt. Et s’il savait, à l’occasion, faire preuve d’éloquence, il savait aussi rester simple et mettre ses paroles au niveau de n’importe lequel de ses interlocuteurs. Sa beauté et sa simplicité en faisaient un être presque universellement apprécié. »

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