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Monsieur Roman
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14 avril 2012

L'instituteur du village

« Je sais tout ce que mon écriture a d’archaïque. Je ne produis en effet pas de « texte », cette négation du rapport des mots au monde, j’écris. Je me rends bien compte que la conception de ce que l'on a tendance à unifier sous le terme vague de littérature a changé. Je ne parle pas des changements intervenus depuis son origine car il n'y a pas grand chose de commun (que pourrait-il y avoir de commun ?) entre l'épopée de Gilgamesh et "Les mémoires d'outre tombe" de Chateaubriand que je parcours depuis ce matin. Non. La littérature a changé depuis que je m'en préoccupe, c'est-à-dire environ 80 ans. » m’écrit Maurice Roman en m’envoyant ses derniers textes. C’est ainsi, c’est son écriture et c’est ainsi que je l’accepte. Il est de même parfois plus facile d’inventer que de se souvenir… Parfois même plus exact. L’imaginaire est un refuge pour la mémoire et nommer une chose suffit souvent à en éprouver la sensation. Ce n’est pas la vérité de l’Histoire — s’il en est une — que j’apprécie dans ce que m’écrit Maurice Roman mais les possibilités d’un homme.

Au village, l’instituteur était un dieu laïque. Son père étant célibataire représentait en plus, quelque chose comme l’espoir dans un nouveau futur : chaque famille voulait l’avoir à tour de rôle à sa table. J’imagine que, bien qu’il soit venu se ressourcer dans cet espèce d’ermitage de l’éducation que représentait le village si isolé de La Roche, il devait plutôt apprécier de pouvoir sortir de sa classe, une classe unique depuis les enfants encore nourrissons du cours préparatoire jusqu’au adolescents du certificat d’étude. Dix sept élèves — sept garçons, dix filles . Sortir de l’école, une petite maison rustique aux murs de granit aussi épais que ceux d’une forteresse comprenant au rez-de-chaussée l’unique salle de classe et, à l’étage, son logement : trois petites pièces et une cuisine.

Tous les midis, il mangeait chez lui, à l’école, mais les onze familles du village tenaient toutes à l’avoir à tour de rôle à leur table. Il était difficile dans le contexte très particulier du village de ne pas répondre à diverses attentes de ceux avec lesquels il avait à vivre jour après jour et dont, rapidement, il saurait tout. Désireux de faire preuve d’une certaine indépendance, il avait accepté mais en instaurant cependant une « rotation diplomatique » sur trois semaines, n’acceptant de partager que leurs repas du soir.

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