Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Monsieur Roman
Monsieur Roman
Visiteurs
Depuis la création 2 891
29 juin 2012

De quoi dépend l'écriture

J’avoue bien aimer les éternelles hésitations de Maurice Roman qui bien que prétendant raconter sa vie et ainsi se donner un but linéaire, ce que j’essaie de traduire au mieux dans l’autre blog qui lui est dédié, n’arrête pas d’errer d’un thème à un autre au gré des hésitations de sa mémoire et de sa pensée. Lorqu’il se propose à aborder enfin le sujet véritable de ses écrits — l'histoire de sa vie —, nouvelle déviation, il lui reste, dit-il, un dernier chapitre qui n'est pas sans importance pour la suite: le mariage de ses parents, mais il ne l’aborde pas tout de suite. Il va ainsi, sans ordre véritable, d’un souvenir à l’autre, sans jamais être vraiment sûr qu’un souvenir soit un souvenir ou une invention de son esprit vieillissant, s’interrompant, par exemple pour parler du temps qu’il fait au moment même où il écrit, reliant ainsi passé et présent par un lien qui n’est pas sans perturber son lecteur : « Nous sommes passés par la pluie, puis des nuages épars et nous allons revenir au soleil même s'il fait maintenant un peu plus frais. Je ne sais donc encore ce que je vais faire de ma journée. Une certitude, j'ai déjà commencé ce matin la relecture des "Histoires Naturelles" de Pline l'ancien. Je ne peux que les recommander tant elles sont poétiques dans leurs mélanges. Le livre XI notamment est passionnant et j'aime beaucoup la description des parties des corps. » Maladresse ? Je penche plutôt pour une grande habileté stylistique: un auteur est ce qu’il est au moment où il écrit ce qu’il était, et ce qu’il est, à ce mement là, dans le moment même de l’écriture n’est pas sans influencer le récit de ce qu’il pensait être. L’écriture, même celle d’une autobiographie, relève ainsi davantage de l’imagination que de la mémoire. N’avoue-t-il, pas ainsi : “Tant j'étais en bonne santé, j'ai longtemps vécu comme si je n'avais pas de corps ou, plus exactement que je n'avais pas à m'en occuper car il fonctionnait seul, en silence, répondant toujours à mes sollicitations. Mais avec l'âge, j'ai dû accepter cette idée difficile à vivre, que mon corps avait ses modes de fonctionnement propres sur lesquels mon cerveau n'avait pas réellement de prise. J'ai de plus en plus souvent de petites problèmes, sans gravité mais qui m'irritent plus qu'ils ne m'entravent: je suis bien obligé de prendre en compte ce fait nouveau. Aujourd'hui, par exemple, sans raison aucune, je ne suis pas bien: envie de vomir, mal à la tête, fatigue… rien ne va, de maître actif je me sens ravalé par mon corps au statut d'esclave de ses caprices. Ma vie actuelle n'est faite que de "petites choses", comment un d'entre vous pourrait-il s'y intéresser ? Dois-je inventer des crimes, des viols, des menaces ? Au fur et à mesure que j’avance dans l’histoire de ma vie, que je recule devant ce que je dois dire, je m’aperçois que le titre « Ma vie », sous sa banalité tranquille, annonce mal le récit que je veux en faire. Il me faut donc trouver un titre. Et, pour l’instant j’hésite encore : Dissimulation, Un homme intranquille, Choses infimes et infirmes, Mensonges et impostures, Mémoire et oubli… Peut-être faut-il que j’avance encore. Nombre d’écrivains en effet, lorsque ce n’est pas l’éditeur qui choisit le titre, disent ne le trouver qu’à la fin de l’écriture: un titre doit être une évidence». Aveu sans équivoque de l’humanité de l’écrivain qui écrit avec la totalité de son corps davantage qu’avec son seul cerveau. Tout texte est un produit physiologique.

Ce n’est qu’en mettant tout cela au clair qu’il peut reprendre son récit.

Publicité
Commentaires
Publicité
Monsieur Roman
Archives
Derniers commentaires
Publicité