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Monsieur Roman
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18 novembre 2012

nécessité de l'écriture

«Plus j’écris et plus je sens en moi un désir d’écriture autre mais je ne parviens pas à bien définir ce que pourrait être cet autre», déclare Maurice Roman qui continue : «Je sens un vrai manque d’adéquation entre mon désir et mes productions. Changer… mais comment, vers où aller ? Le fait que Marc Hodges réécrive mes notes pour en faire des pages, d’une part en faisant comme si je les avais écrites moi-même, d’autre part en les présentant comme son récit et ses commentaires personnels, n’est sûrement pas étranger à cet état d’esprit : dans ces deux cas je vois mon écriture de l’extérieur et me rends compte de la distance dans laquelle je me situe. Malgré tout, écrire dans le vide pour tenir. Se réveiller chaque jour, chaque jour lire, écrire quelques lignes, choisir parfois une photo, choisir une chanson… pour tenir. Pour tenir se donner une discipline, des règles pour tenir: faire le tour du village, boire un café médiocre au Commerce, saluer quelques personnes qui m’indiffèrent et feignent de s’intéresser à ma santé, sous le soleil faire une promenade dans la campagne. À midi, midi juste et le soir dix neuf heures trente, préparer un repas pour tenir. Se forcer à varier les plats alors que ce qui importe n’est que de se nourrir. Pour tenir rythmer le quotidien d’habitudes, le jalonner d’obligations fictives pour tenir. Tenir. Jusqu’à quand… Pourquoi ?»
La question existentielle est ainsi au cœur de l’écriture de Maurice Roman pour qui écrire est le seul moyen qui lui permet de continuer à vivre: «J'émerge un peu de cette vague dépression qui m'a retiré du monde durant quelques jours et revient le désir d'écrire, de jeter mes mots aux vents désordonnés de Facebook. Peut-être se déposeront-ils au fond de quelques yeux.» Cette illusion que sa vie n’aura pas été inutile, plutôt que la fin de sa vie n’est pas inutile si ses mots trouvent quelques lecteurs, aussi peu nombreux soient-ils. Après une vie riche, pleine de rencontres, de surprises, de sociabilité, la retraite à laquelle les difficultés de l’existence le contraignent, dans ce village paisible et très ennuyeux de Montolieu, ne lui permet pas de croire que vivre, au-delà de sa simple réalité physique, au-delà du souffle et de l’étonnante force de son corps, présente encore un intérêt quelconque. Il est ainsi sans cesse déchiré entre l’élan vital de son corps qui le pousse à marcher des heures dans la campagne et l’immense affaiblissement intellectuel dans lequel son environnement l’enferme. Trop fort physiquement pour regarder avec plaisir et soulagement l’idée de sa mort probable, il sent sa vivacité d’esprit trop inutile pour éprouver encore du plaisir à vivre. Contrairement aux autres vieillards qu’il connaît dans son village, il ne peut se satisfaire de la simple sensualité du soleil sur sa peau, de la volupté d’une nourriture saine, de la jouissance physique d’un corps qui fonctionne sans heurts. Et de cette contradiction, il est pleinement conscient : «Certains parmi mes amis me reprochent ma nostalgie, mais la nostalgie n'est en rien une lamentation, je ne vous demande pas de pleurer sur mon sort qui est plutôt heureux ni sur ma mort prochaine qui n'est pas scandaleuse après une vie longue. J’expose ainsi seulement ce que j'ai été en ne demandant que de me regarder avec amitié. Je sais que certains de mes «amis» se moquent de mes lectures mais communiquer dans le vide, c'est toujours croire communiquer et les échanges de parole, comme me l'ont appris ma fréquentation des cafés sont souvent si vides qu'elles s'apparentent à des soliloques.» Soliloquer ne lui est pas une motivation à vivre.

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