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Monsieur Roman
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14 juillet 2013

la mort

Décidément le temps n'est pas avec moi: pas envie de sortir, pas envie de travailler, pas envie de lire, pas envie d'écrire. Je traîne d'un fauteuil à une chaise et d'une chaise à un fauteuil. Je n'ai envie de travailler que quand je fais un minimum de marche car bouger active mes neurones. Pourtant il faudra bien que je me décide.
Difficile d’ignorer le « Madame Bovary » de Gustave Flaubert ; je n’ignore pas que parlant de Maurice Roman, c’est en partie de moi que je parle, que dans cette volonté un peu stupide, dans cette tâche que je me suis assignée à partir des fragments qu’il m’envoie de loin en loin, c’est mon incapacité à parler de moi que j’affronte. Je n’ignore pas non plus que je me suis contraint à trop de tâches à la fois et que j’aurais beaucoup de mal à les mener toutes au bout. Jamais je n’ai pu rien finir et mon œuvre — si l’on peut désigner ainsi un ensemble disparate de productions diverses — refuse de vouloir s’achever. J’ai peur de la mort, cette perspective encore lointaine mais cependant déjà visible à l’horizon et toute clôture me semble m’en rapprocher davantage. Je tergiverse. Je ruse. Je crois ruser avec la vie. J’écris pour survivre. J’écris pour être. J’écris pour me persuader que je suis et que mon passage sur terre n’aura pas été qu’une forme brumeuse que l’espace du temps dissipe sans retour. Comment laisser une trace, même infime. Pourquoi vouloir laisser une trace ? Il me semble que sans cela je n’aurai pas été. Prétention ? Naïveté ? Je ne peux penser à ces multitudes de mort dont je suis issu sans espérer que quelque part quelque chose, quelqu’un transportera le fumet de ma vie au travers des âges. La mort est inadmissible. Être, ne plus être. Avoir conscience d’être et perdre cette conscience m’est le suprême scandale : la vie, cette abstraction absolue, se servant de nous pour sa seule cause. La vie m’apparaît comme un monstre qui a besoin de nous pour se prolonger sans autre but que cette prolongation. Pour elle nous ne sommes que des « nourritures » que l’on consomme sans réel appétit, sans désir ni plaisir, uniquement pour se prolonger… Mais passons, c’est de Maurice Roman que j’ai promis de parler ici. Je dois dire que je ne suis pas d’accord avec lui quand il parle de la mort. « Ronald me reproche de parler souvent de ma mort ce qui, dit-il fait très vieillard. Ces remarques m’amusent car je n’ai pas besoin de « faire » vieillard car je suis réellement un vieil homme. J’ai essayé de lui expliquer qu’en fait, parlant de la mort, je suis dans une sorte de dissociation cognitive. Je sais, comme nous le savons tous, que je vais mourir, mais je ne le crois pas, je ne le sens ni dans ma chair ni dans ma tête. J’ai en effet l’impression d’avoir toujours vécu, comme s’il n’y avait pas eu une naissance ce 31 décembre 1922. Dès que je me pense, je me pense vivant, plus exactement à me ressentir mort, et ne parvient pas non plus à me penser mort. Je suis vie, le reste n’est que philosophie ou, pire, vocabulaire ».
Contrairement à lui, je suis sans cesse sous le signe de la mort, qu’elle m’obsède, quel est le seul moteur de cette fuite en avant que je pratique dans l’écriture marquant de son signe toutes mes pages, même les plus apparemment apaisées ou anodines.

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