Maurice Roman serait né le 31 décembre 1922, du moins c'est ce qu'il raconte. Date peu favorable aux cadeaux, ce qui l’aurait attristé durant toute son enfance car cadeaux d'anniversaire et cadeaux de Noël étaient pour lui généralement confondus.

Il dit que ça a mal commencé. Il prétend, mais c’est invérifiable, que ses parents l’auraient conçu en écoutant le «Tango Neurasthénique» que Georgius chantait cette année-là : «Ce beau jeune homme brun / Sort du bal Tabarin / Et s'il n'a plus le front serein, (Refrain) C'est le tango qui l'a rendu neurasthénique». Autant qu’il s’en souvienne en effet, son père adorait les chansons populaires et il l’a souvent entendu fredonner ce tango parfois repris en sourdine par sa mère dans une vraie complicité heureuse. Il l’entendra aussi fredonner «Machinalement» d’un certain Victor Boucher et, surtout, «j’en ai marre» de l’inoubliable Mistinguett: Si c'est ça la vie / Eh bien, je vous l'déclare / Sans être socialo / C'est pas rigolo / Et moi j'en ai marre!», toutes chansons qui ont de peu précédé son apparition dans un monde où l’oublié Alexandre Millerand était Président de la République et, l’encore plus oublié, Charles de Lasteyrie du Saillant, Ministre de nos finances. Il est vrai que tout cela ne le préoccupait pas alors beaucoup pas plus que ces derniers ne s'intéressaient à sa naissance. Quand il pleurait — il paraît qu’il braillait — ce n’était sûrement pas à cause ou pour la politique. Pas plus que ne l’inquiétait le fait que ce même jour cette République décrétait la naissance du permis de conduire, preuve s’il en est que, en haut lieu, certains se souciaient déjà, de son futur de citoyen. Dans ce monde fait de bulles multiples, chacun reste dans la sienne et il faut des conflagrations ou des rencontres d'accident pour que, parfois, elles explosent projetant l'une dans l'autre des vies qui n'auraient jamais dû se rencontrer.

Sa naissance

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